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« L’éthique de l’euthanasie est une éthique de renoncements »

Alors que le gouvernement prépare une loi sur « l’aide à mourir », le professeur Emmanuel Hirsch, figure majeure de l’éthique médicale, tire la sonnette d’alarme. Dans son nouvel ouvrage Euthanasie, le dernier acte ?, il dénonce ce qu’il nomme « la conclusion d’une cascade de renoncements » : un effacement progressif de la pensée éthique au profit d’une compassion dévoyée.

Loin d’une conquête soi-disant humaniste, Emmanuel Hirsch y voit la marque d’une déroute morale : « Épurer avec bonne conscience l’espace public en donnant à croire que le droit à mourir sur ordonnance est l’ultime conquête dont nous serions capables, c’est le constat accablant d’une défaite de la pensée », affirme-t-il.
Son analyse renverse la perspective dominante : ce n’est pas la mort qu’il faut organiser, mais la vie qu’il faut défendre.

Le professeur dénonce la posture d’un « modèle français » prétendument sans dérives, un nouveau catéchisme laïc qui exige l’adhésion inconditionnelle sous peine d’être taxé d’inhumanité. Pourtant, la véritable inhumanité, écrit-il, consiste à abandonner les plus fragiles, ceux qui dépendent le plus de la solidarité collective.

« Les personnes vulnérables, si dépendantes de nos choix politiques, n’ont jamais été aussi fragilisées par ce qu’elles perçoivent des débats actuels au parlement », alerte-t-il.
Leur vie, interroge M. Hirsch, « sera-t-elle encore digne d’être reconnue comme inaliénable dès lors que l’on autorise la mort provoquée à la demande de celui qui ne supporte plus la souffrance d’exister parmi nous ? »

Face à ceux qui invoquent la liberté individuelle, Emmanuel Hirsch oppose une exigence de justice sociale : « La responsabilité politique devrait d’abord s’exercer dans la prévention d’une mort dans la précarité, l’inégalité, la marginalité — pour ne pas dire l’indignité. »
Autrement dit, avant de proposer la mort, il faut offrir la présence, le soin, la compassion.

Dans un passage saisissant, l’auteur met en garde avec force contre « une tolérance qui apparaît comme une reddition ». L’urgence, dit-il, ne devrait pas être de légiférer sur l’euthanasie, mais sur nos obligations envers les malades, les personnes âgées, les handicapés et les isolés.

Ce livre est un appel à retrouver la hauteur morale d’une société qui soigne au lieu d’éliminer, qui accompagne au lieu d’écarter. Emmanuel Hirsch rappelle que renoncer à protéger la vie fragilisée, c’est trahir la démocratie elle-même.

Source : https://genethique.org/euthanasie-le-dernier-acte-une-ethique-des-renoncements-emmanuel-hirsch/

Photo: Adobe Stock

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