A la mi-mai, le Sénat de l’Alabama adoptait le projet de loi « le plus restrictif » des Etats-Unis sur l’avortement, interdit dans tous les cas hormis ceux de danger pour la vie de la mère ou « anomalie létale » de l’enfant à naître. Dès le lendemain, le gouverneur, Mme Kay Ivey, ratifiait le texte en affirmant clairement ses motivations : « Toute vie est un cadeau sacré de Dieu. »
Cette loi punit de 10 à 99 ans de prison le médecin qui pratique l’avortement, mais ne prévoit pas de peine pour la mère.
Elle est le résultat du vote démocratique de législateurs démocratiquement élus, et reflète le succès croissant des positions pro-vie dans de nombreux secteurs de la population américaine.
Sur place, la très gauchiste ACLU, organisme de défense des « libertés civiques », annonçait aussitôt son intention d’aller en justice pour empêcher l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, prévue pour la mi-novembre. C’est désormais chose faite, avec l’appui du Planned Parenthood et de plusieurs cliniques d’avortement locaux qui ont tous déposé plainte.
L’Alabama Human Life Protection Act (Loi de protection de la vie humaine) sera donc judiciairement contesté, mais ses promoteurs s’y attendaient. Le republicain Terri Collins, qui l’a porté, ne cache pas que cela faisait même partie de l’objectif : créer une nouvelle occasion permettant à la Cour suprême fédérale de revenir sur la jurisprudence Roe v. Wade qui depuis 1973 autorise l’avortement à l’ensemble des Etats-Unis.
Cette initiative qui vise tout simplement a empêcher le meurtre délibéré des tout-petits a été accueillie avec horreur dans les médias mondiaux, et particulièrement en France où l’on dénonce son caractère « particulièrement répressif ».
On parle d’un « droit des femmes » qui aurait été bafoué, de régression… C’est à peine si l’on n’évoque pas un retour à la barbarie. Pour jouer sur la corde sensible, L’Obs a même donné la parole à une Américaine « traumatisée par un viol » : pour Samantha Blakely, enceinte de son agresseur il y a deux ans, « avorter fut alors une question de survie ». « J’aurais mis fin à ma vie », raconte-t-elle dans une vidéo diffusée par le site francophone.
Vous ne trouverez guère dans la presse mainstream les témoignages inverses qui fleurissent pourtant, de femmes violées qui sont heureuses aujourd’hui de ne pas avoir ajouté le traumatisme de l’avortement à celui du crime de viol qu’elles ont subi.
Vous n’y apprendrez pas non plus que l’un des sénateurs de l’Alabama favorable au texte interdisant la quasi-totalité des avortements, Garlan Gudger, a subi de nombreuses menaces pendant la discussion du projet – on promettait notamment de violer sa femme s’il votait « oui ».
Mais si cette affaire est porteuse d’une leçon, celle-ci est claire : même en 2019, il est possible de se battre contre le faux « droit » à l’avortement, et de gagner. Pourquoi pas en France ?
Marie Dirix
Photo : drapeau des États-Unis et de l`Etat d Alabama